Appel à communications

Pour se saisir de ces deux axes du colloque « Comment penser l’Anthropocène ? » – celui de la globalité et de la diversité, celui de l’adaptation et de la réduction – et en articuler les enjeux, il nous paraît nécessaire de confronter les point de vue de ceux qui étudient et conceptualisent les rapports entre les sociétés humaines et leur environnement dans une large perspective comparative.

Nous proposons donc que les participants au colloque s’interrogent sur les questions qui, en matière de changement climatique, ont fait récemment l’objet de questionnements philosophiques, anthropologiques et sociologiques en les confrontant aux deux axes définis. Les thèmes suivants de réflexion pourront donc être retenus:

  • Responsabilité et justice dans la façon de répartir les efforts dans les réponses au changement climatique, sur le long terme. On rappellera, pour lancer la discussion, le principe de “responsabilité commune mais différenciée” adopté à Rio et repris, depuis lors, par les conférences sur le climat. Cette question déjà débattue au sujet des engagements pour réduire les émissions, mérite un examen approfondi. Mais elle se pose aussi pour l’adaptation. Les conséquences locales du changement climatique en cours (élévation du niveau des océans, diminution ou augmentation brutales des niveaux moyens de précipitations, fonte des glaciers et banquises, fréquence et intensité des sècheresses, des ouragans, des incendies de forêt, etc.) atteindront différemment des populations, qui n’ont pas toutes les mêmes capacités de résilience. Responsabilité et justice supposent aussi une solidarité active des pays les plus aptes à s’adapter avec les populations les plus atteintes et/ou les plus démunies (comment accueillir les migrants climatiques et quelles en seront les conséquences sociales et culturelles ?).
  • L’hypothèse de l’anthropocène implique que l’histoire humaine et celle de la nature se rencontrent, ce qui revient à affirmer l’unification de l’humanité, considérée comme une force naturelle. Que signifie l’unité de l’humanité ainsi appréhendée dès lors que l’on constate que le poids des populations humaines dans le changement global est inégal, et qu’elles en seront différemment atteintes ? Que signifie-t-elle au regard d’une approche anthropologique qui a toujours insisté sur la diversité des humains pour saisir l’humain? Et si la recherche d’un accord commun entre les nations rend nécessaire la définition d’un intérêt général sur quelles bases penser cette unité, et ce, d’autant plus, que l’accord ne doit pas être seulement politique, mais aussi scientifique ?
  • La question qui se pose pour l’anthropocène se pose aussi pour les représentations globales, scientifiques ou non, de la planète qui lui sont associées, comme celles de Gaïa. Quels rapports entretiennent-elles avec la diversité de la façon dont les populations humaines perçoivent les transformations de leur milieu de vie (compte tenu de leurs visions du monde, de leurs pratiques et de leurs savoirs) ?
  • On insistera plus particulièrement sur la question de l’adaptation jusqu’ici assez négligée par une réflexion philosophique qui s’est volontiers focalisée sur l’héroïsation volontariste de la réduction. Pourtant la question de l’adaptation permet de mieux caractériser la diversité des effets, celle des réactions et la façon de les envisager. Elle permet de repenser aussi, à la lumière des connaissances de l’anthropologie, le problème de la construction de niches environnementales et des conditions optimales de leur maintien. On peut ajouter que pour les vivants non humains dont les conditions d’existence seront, comme celles des humains, transformées, sinon rendues impossibles, par le changement climatique, il n’y a d’autres solutions que l’adaptation. Dans le destin commun que dessine le changement climatique en cours, les humains, comme les non-humains, ne sont pas tous aussi vulnérables et tous ne sont pas également capables de faire face aux modifications de leur environnement.
  • On peut aussi aborder la question, très largement débattue, de la géo-ingénierie, ou ingénierie climatique, non seulement du point de vue des ses effets (globaux et diverses), mais aussi pour savoir si elle relève de l’adaptation (la technique pouvant être envisagée comme la forme humaine de l’adaptation) ou de la réduction (puisqu’il s’agit d’agir globalement sur le climat).

A l’occasion du colloque, nous avons accueilli une centaine de propositions d’intervention, en français et en anglais. L’appel à communication est clos depuis le 31 mars 2015 (vous pouvez nous contacter à l’adresse: anthropocene.conference@gmail.com).

photo: unnu